Conduite et consommation de CBD : gare au piège juridique ! 

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Malgré la légalisation du cannabidiol (CBD), un conducteur peut se retrouver en infraction s’il en consomme avant de prendre le volant. Ce paradoxe découle d’une tension entre le cadre légal de la commercialisation du CBD et le régime strict du Code de la route en matière de stupéfiants. 

 

Le CBD, substance extraite de la plante de chanvre, est légal en France sous réserve que le produit contienne moins de 0,30 % de tétrahydrocannabinol (THC), le composé psychoactif du cannabis considéré comme un stupéfiant. Toutefois, cette tolérance ne s’étend pas à la conduite automobile. 

 

En effet, l’article L.235-1 du Code de la route interdit de conduire sous l’influence de stupéfiants, sans qu’il soit nécessaire de prouver un état de dépendance ou d’altération des capacités. Une infraction est constituée dès qu’une analyse toxicologique détecte la présence de THC, même en quantité infime, sans seuil minimal de tolérance, contrairement à ce qui existe pour l’alcool.

 

Une jurisprudence récente de la Cour de cassation illustre les conséquences juridiques de cette règle stricte. 

 

En l’espèce, un conducteur avait été contrôlé positif au THC après avoir consommé du CBD. La Cour d’appel l’avait relaxé, considérant que l’analyse toxicologique ne précisait pas le taux de THC et que l’intéressé avait déclaré ne consommer que du CBD légal. Le Procureur général a formé un pourvoi, faisant valoir que l'infraction de conduite sous stupéfiants est établie dès que la présence d’une substance illicite est détectée, peu importe le dosage. La Cour de cassation lui a donné raison, rappelant que la consommation légale de CBD n'exonère pas de responsabilité dès lors que du THC, même en traces minimes, est détecté dans l’organisme.

 

Cette affaire soulève des questions juridiques fondamentales. En matière de conduite sous stupéfiants, l'infraction repose sur le simple élément matériel de la détection de THC, et non sur un état de conduite dangereuse. Le débat sur l'élément intentionnel reste plus délicat. Peut-on reprocher à un conducteur d’avoir agi intentionnellement s’il pensait consommer un produit légal ? La Cour de cassation ne tranche pas directement cette question, mais la tendance jurisprudentielle est claire : la méconnaissance des risques liés à la consommation de CBD n’exonère pas de la responsabilité pénale. Le consommateur demeure responsable de ses choix, même si la teneur en THC du produit légal était négligeable.

 

Par cette décision, la Cour de cassation rappelle que le droit de la consommation et le droit routier ne se superposent pas toujours de manière cohérente. Les fumeurs de CBD doivent être conscients des risques de contrôle positif au THC, malgré le cadre légal du produit. Le droit, soucieux de la sécurité routière, adopte ici une approche de responsabilité objective, où seule la détection compte, indépendamment des intentions du conducteur. Cette position, sévère mais conforme à la logique du Code de la route, mérite d'être connue des consommateurs pour éviter des sanctions injustement perçues comme surprenantes.

 

Cass, Crim, 21 juin 2023, n°22-85.530

 

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